22 octobre 2018

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Comment développer une pensée critique quand on est un professionnel du risque ?

L’auditeur et le gestionnaire des risques sont confrontés dans leurs missions à un grand nombre de difficultés et contraintes, parmi lesquelles : réaliser des travaux objectifs, communiquer autour de notions complexes (gouvernance, risque et contrôle…), convaincre de la pertinence de recommandations… Pour les aider, l’IIA, dans son référentiel des compétences de l’auditeur interne, recommande de développer des compétences que l’on dit être celles d’un penseur critique. Jacques Boisvert et Robert Ennis considèrent que ces compétences sont notamment :
  • La tendance à adopter une position (et à la modifier) quand les faits le justifient ou qu’on a des raisons suffisantes de le faire
  • Apprécier la qualité d’un argument
  • Définir les termes en fonction du contexte…
Tout cela à l’air génial me direz-vous, mais comment acquérir ou renforcer ces compétences critiques ? Et bien justement en adoptant une posture de philosophe, comme le proposait Luc de Brabandere dans le dernier numéro du magazine. La philosophie permet d’articuler trois modes de pensée (argumenter, conceptualiser, problématiser) et à ce titre aide à développer les compétences citées plus haut. Je vous propose ici quelques lectures pour être plus efficaces dans vos travaux. « L’éthique managériale » du philosophe Ghislain Deslandes permet de mieux comprendre les principes du code de déontologie de l’audit. Schopenhauer, dans son ouvrage « l’art d’avoir toujours raison », propose des procédés pour prendre en défaut le discours d’autrui pour le disqualifier. Un auditeur ou un gestionnaire des risques tireraient un grand profit à s’inspirer de ces procédés dans les situations professionnelles qu’ils rencontrent. La philosophe Céline Kermisch clarifie le concept de risque au regard de ceux d’incertitude et de danger. Cette clarification permet à un professionnel du risque de mieux communiquer sur ce sujet. Développer une pensée critique, adopter une posture de philosophe, c’est aussi renforcer ses connaissances académiques dans le domaine de la gestion. Comment mieux comprendre la portée respective des modèles utilisés en audit interne ou en gestion des risques sans connaître les travaux académiques des chercheurs en « management control » (H.Bouquin, R.N. Anthony…) ? Comment apprécier la portée du modèle des trois lignes de maîtrise sans connaître la théorie des configurations organisationnelles de Henry Mintzberg ? Sans esprit critique, un auditeur interne pourrait finalement voir sa crédibilité remise en cause surtout si la mission qu’il conduit à une forte dimension stratégique ou managériale. Autrement dit, pour terminer sur une tonalité encore estivale, l’auditeur ou le gestionnaire de risques doit-il uniquement se préoccuper de l’écume déposée sur le sable par les vagues ou ne doit-il pas aussi déplacer son regard vers les courants qui traversent en profondeur les océans ? Hervé Cavey Expert en audit interne CIA Gérant de la SARL Kamae audit et conseil