26 juin 2016

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Les scandales sensibilisent-ils à l'importance de l'audit interne ?

La semaine dernière, deux groupes d'investisseurs ont émis des recommandations invitant à ne pas voter la confiance au conseil d'administration de Volkswagen. Les messages, émanant des groupes de conseil en investissement PIRC et Institutional Shareholder Services (ISS), font une évaluation tranchée et sévère des pratiques de gouvernance du constructeur automobile actuellement dans la tourmente. Les implications de ces recommandations sont importantes pour les investisseurs et la direction de Volkswagen. Cependant, elles véhiculent un autre message, essentiel, sur la valeur de l’audit interne. Les analyses du PIRC et de l'ISS reposent sur leur conviction que Volkswagen n'a pas fait suffisamment d’efforts pour résoudre les faiblesses de sa gouvernance d'entreprise, d'après les rapports publiés par ces deux organismes. Ces faiblesses, un ensemble de pratiques contraires aux meilleurs standards de gouvernance, affecteraient tous les niveaux de l'organisation. D'après PIRC, Volkswagen n'a pas clairement séparé les fonctions financières des fonctions de contrôle, son modèle de rémunération est excessivement lié aux ventes, le groupe ne dispose pas d'un programme de lanceurs d'alertes, et sa fonction audit interne est inefficace. Dans son rapport, l'ISS a attribué le risque le plus élevé à Volkswagen et l’organisme soutient la demande des investisseurs portant sur quatre audits spéciaux visant à établir si les membres du conseil d'administration ont manqué à leurs devoirs lors du « dieselgate », l'année dernière. Il ajoute : « [...] il existe des préoccupations justifiées sur la capacité de l'entreprise à mener une enquête interne sur ces questions et à présenter des conclusions impartiales et transparentes aux actionnaires. » Inutile de savoir lire entre les lignes pour comprendre que, pour ces deux grands groupes d'investisseurs, la fonction d'audit interne du constructeur laisse à désirer. Pour ma part, je ne partage pas nécessairement leurs analyses sur la qualité du service d’audit interne de Volkswagen. Je trouve cependant décourageant qu'il faille des événements de l'ampleur du « dieselgate » ou d'autres scandales d'entreprises pour que les investisseurs prennent conscience de l'importance de l’audit interne. Bien sûr, cette prise de conscience est bonne à long terme. Les investisseurs qui valorisent la bonne gouvernance, son importance pour l'entreprise, ainsi que celle de l’assurance fournie par l’audit interne, sont plus enclins à soutenir, voire à exiger un management solide et efficace ainsi qu’un audit interne fort et indépendant. La reconnaissance croissante de la valeur de l’audit interne ne devrait pas se limiter aux investisseurs. Les membres des conseils d'administration se sentent de plus en plus exposés, face au nombre record de campagnes menées par des fonds spéculatifs en 2015. D'après une étude récente d'Agenda, les conseils d'administration de près de sept répondants sur dix discutent du risque d'être approchés par un hedge fund. Toujours selon Agenda, les stratégies de ces fonds évoluent et incluent désormais la gouvernance et la composition du conseil d'administration. Dans un billet précédent, j’ai analysé le rôle de l'audit interne face à ces actionnaires. La bonne gouvernance est simplement le meilleur rempart contre les fonds spéculatifs et l’audit interne doit constituer une partie de ce rempart. Voici ce que j'écrivais à ce propos : Les entreprises peuvent réduire le risque de devenir des cibles faciles en déployant des stratégies commerciales efficaces et des processus garantissant la bonne gouvernance, tout en permettant à la société d'offrir une croissance durable de sa valeur pour les actionnaires. Stocks sous-évalués, mauvaise gestion, coûts excessifs ou bénéfices faibles : tous ces éléments font d'une entreprise une cible idéale pour les actionnaires activistes, mais ils sont aussi les symptômes d'autres risques potentiels. Les conseillers des investisseurs comprennent mieux le rôle de l’audit interne dans la bonne gouvernance, et les conseils d'administration se préoccupent davantage de leur vulnérabilité face aux fonds spéculatifs; cela place notre profession dans une position de force. J'invite les responsables d’audit interne à discuter ces évolutions avec leur comité d’audit et leur conseil d’administration. Comme toujours, vos commentaires sont les bienvenus.